Émilie David Even



A l’intuition : les débuts

28 mars 2014.

Je craque. Je pleure, et je pleure, sans plus pouvoir m’arrêter. Je pensais qu’une fois passés mes 28 ans, le 12 mars, cette souffrance liée au désir d’enfant s’arrêterait, puisque j’aurais dépassé l’âge limite avant lequel je voulais un enfant. Comme un switch identitaire un peu magique.

Sauf que ça n’a pas marché. Mais 28 ans sont là, et c’est pire que tout.

Et j’écris : « Qui je suis à 28 ans sans enfant ? »

Voilà le déclic. La question clé, enfin émergée, inscrite, visible, assez claire pour pouvoir y chercher une réponse.

Je me regarde dans la glace : j’ai des boutons dans le cou, depuis plusieurs années maintenant, du ventre qui ne part pas. Je ne m’aime pas, j’ai même honte de qui je suis devenue. Une maman sans enfant.

Je le réalise peu à peu : oui, je me comporte comme une maman. Depuis quand ? Je cherche, je relis tous mes journaux. Bien sûr, c’est le seul moment où je n’ai rien écrit ! Mais ça me revient, petit à petit : un séjour de vacances où les jeunes comme les anims m’appelaient Maman, moi la directrice, parce que je prenais soin de tout le monde. Et ça m’était resté.

Sauf que je n’étais pas Maman. Alors j’étais qui ? Bonne question.

Puisque je n’étais plus que masques, fantasmes, illusions, j’ai tout envoyé bouler et j’ai renoué avec la Moi réelle et authentique dont je me rappelais le mieux : l’adolescente de 17 ans.

Alors qui j’étais à 17 ans ?

C’est drôle parce que j’ai récupéré cette photo de moi à cet âge il y a tout juste deux semaines dans les archives de ma grand-mère !

A 17 ans, je faisais de la moto, notamment avec mon papa, j’avais des locks rouges, des Doc Martens violettes, j’étais interne au Lycée Marie Curie à Tarbes où j’avais rejoint une super copine qui y étudiait le théâtre. J’y étudiais aussi l’histoire des arts, je créais mes premières vraies relations amicales, dans une bande de potes à tendance hippie, qui ressemblait beaucoup à ce que je savais de mes parents au même âge. Et je me sentais enfin libre d’être moi-même après des années terribles de harcèlement au collège.

A 17 ans, j’ai fait du stop pour la première fois (comme mes parents… :-)), avec des copains pour aller passer le week-end chez l’une d’entre nous. J’y ai pris goût et je ne me suis plus jamais arrêtée.

A 17 ans, une de mes copines a commencé à jouer de l’accordéon diatonique. J’ai adoré ça et je me suis dit qu’un jour, j’en jouerais aussi.

A Tarbes, il y avait un festival de tango, qui existe toujours d’ailleurs. Et j’ai rêvé de danser le tango : tellement sensuel, tellement beau.

Depuis que j’étais petite, j’écrivais, et je rêvais que mon nom apparaisse sur un livre. A 17 ans, j’écrivais des poèmes, et j’ai remporté le deuxième prix d’un concours de lycéens.

Donc à 28 ans : j’ai appris à danser le tango ; j’ai appris à jouer de l’accordéon ; je suis partie en voyage à l’intuition, en stop, à pied et sans destination. Et je n’ai plus jamais arrêté de suivre mon intuition.

Le livre ? Je l’ai publié deux ans plus tard, en même temps que je suis devenue maman, pour de vrai cette fois-ci !

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